Nous continuons de relater le mouvement de grève des conducteurs de train suédois. A lire aussi :
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Basé sur un article de Per Olsson, de Rättvisepartiet Socialisterna (Suède)
Qu’est-ce qu’une grève « sauvage » ? Il s’agit d’une grève qui n’a pas été déclenchée par un syndicat. Il peut également s’agir d’une grève qui rompt la paix sociale résultant d’une convention collective. Ou une combinaison des deux, bien sûr.
La paix sociale enchaîne surtout les travailleurs
La loi interdit aux syndicats et aux employeurs de prendre des mesures tant qu’un accord est en vigueur. Mais cela n’a jamais empêché ces derniers de détériorer les conditions alors que les syndicats étaient liés par la paix sociale, d’attaquer les travailleurs en lutte (comme les éboueurs de Stockholm en 2017), voire de violer purement et simplement un accord.
Les « sauvages », ce sont la MTR et ses partisans politiques
À plusieurs reprises, la MTR a préféré enfreindre la loi plutôt que de négocier et a pris pour argent comptant les amendes qui en ont découlé.
Le Seko Pendelklubbens a demandé des consultations des dizaines de fois au cours du premier semestre 2022 sur un large éventail de questions : des dossiers individuels des membres aux violations de la convention collective.
Après que la MTR, le SL et les politiciens régionaux aient commencé à supprimer les accompagnateurs de train, il ne restait plus que l’arme de la grève. Mais le droit de grève s’est érodé et a été affaibli au fil des ans, avec le soutien des dirigeants syndicaux.
Il n’y a donc pas eu de revendication du jour au lendemain de la part des conducteurs de train. Si quelqu’un doit être qualifié de « sauvage », c’est bien la MTR et les politiciens locaux qui s’attaquent aux conditions de travail, aux services, à la sécurité et à l’emploi des conducteurs de train pour augmenter leurs profits.
Les employeurs « sauvages » de Svensk Näringsliv (SN) – la FEB suédoise – ont avant-hier, par la voix de leur vice-président Mattias Dahl, qualifié la grève des conducteurs de train de « sabotage ». Alors que c’est la classe qu’il représente, avec la MTR à sa tête, qui sabote le service des trains de banlieue en augmentant ses profits au détriment des travailleurs et des voyageurs.
C’est contre ce sabotage que les conducteurs de train font grève, avec un soutien massif de la population.
Reconquérir le droit de grève en l’utilisant
C’est par la grève que le droit de grève peut être reconquis. C’est également avec cette arme que les travailleurs ont initialement imposé le droit de s’organiser et de conclure des conventions collectives.
Un exemple récent est la victoire historique du Hamnarbetarförbundet, qui a obtenu le droit de conclure ses propres conventions en 2019 après une longue lutte et de multiples grèves.
L’arme de la grève est l’outil le plus efficace dont dispose la classe ouvrière pour arrêter l’ensemble de l’économie et frapper les capitalistes dans leurs profits. Elle montre qui fait fonctionner la société, produit de la valeur et détient réellement le pouvoir.
C’est la vague de grèves dites sauvages des années 1970 qui a renforcé les syndicats, déplacé le débat social vers la gauche et conduit à une nouvelle législation sur le droit du travail et à la loi sur les conditions de travail. Il n’en a pas été autrement en Belgique.
Érosion du droit de grève
Dès le début, les employeurs ont tenté de prendre des mesures de rétorsion à l’encontre de cette législation du travail, tout en se félicitant des dispositions anti-grève qu’elle contenait. En fait, ces dispositions étaient spécifiquement dirigées contre les syndicats en grève.
Selon la loi, un syndicat ne peut exprimer son soutien à une grève « sauvage » et doit contribuer à mettre fin à la grève, ce que les dirigeants syndicaux ont utilisé comme excuse pour se joindre aux employeurs afin d’attaquer non seulement les grèves, mais aussi leurs revendications.
Des syndicats démocratiques et combatifs, une nécessité
Le fait que le pouvoir au sein des syndicats soit passé à un groupe de plus en plus restreint de représentants élus et de travailleurs ayant peu ou pas confiance dans la lutte et dans leurs propres membres – qui, en 2018 et 2019, semblaient même prêts à coécrire une nouvelle loi anti-grève – souligne l’importance d’une révolte de la base syndicale en faveur de syndicats de lutte démocratiques dotés d’une nouvelle direction et d’une nouvelle politique.
Cette législation est hostile au monde du travail et est à la botte d’une classe sociale qui n’est pas la nôtre. Ces lois signifient qu’une grève « sauvage » doit être organisée en dehors du syndicat ET par la base.
Les syndicalistes du côté des travailleurs ne peuvent donc pas exprimer leur soutien et participer à la grève, même s’ils sont du côté des membres et soutiennent les revendications.
Les participants à une grève « sauvage » peuvent se voir infliger une amende si les employeurs portent la grève devant le tribunal du travail, voire être licenciés s’ils maintiennent leur position après une interdiction de grève prononcée par le tribunal. Mais la solidarité et le soutien aux grévistes font que les employeurs osent rarement aller plus loin que la menace de licenciement. À propos, la MTR réclame une amende de 6 000 couronnes, soit 528 euros, par gréviste. L’entreprise est décidément très remontée contre les grévistes, car le montant habituel est deux fois moins élevé.
Matérialiser la solidarité
La solidarité active avec les grévistes est une ligne de défense contre la répression à laquelle les travailleurs qui utilisent l’arme de la grève continuent de faire face. En ce sens, l’appel lancé cet après-midi par le comité de grève pour que la grève de 72 heures de ce soir (qui se termine à 23h59 comme prévu) se termine par une large manifestation de solidarité est une bonne chose.
Quelle sera la suite ?
Le Seko ferait bien de tenir compte du soutien massif à cette grève et d’annoncer une grève pendant les négociations actuelles de la convention collective pour le maintien des accompagnateurs de train. Ainsi, la grève pourra commencer immédiatement après l’expiration de la convention collective actuelle, le 30 avril, et les syndicats ne seront plus liés par l’interdiction légale de grève.